Le mage noir, par Olivia Gerig, éditions L’âge d’homme
CRITIQUE , POLAR , ROMAN / 6 septembre 2018

Pour Le mage noir, Olivia Gerig renoue avec son personnage d’inspectrice. On avait laissé Aurore en piteux état à la fin de L’ogre du Salève, on la retrouve rétablie physiquement même si les séquelles psychologiques ne se sont pas résorbées. C’est à un réseau, une quasi secte apocalyptique, qu’est cette fois confrontée la sympathique inspectrice de la police judiciaire d’Annecy. Un réseau international qui a infiltré les milieux de la police, de la justice et de la politique.  Difficile dans ces cas-là de savoir à qui faire confiance. Affaires classées, enquêtes bâclées, à Annecy, à Paris et à Genève, la secte semble intouchable. Mise à pied, Aurore va mener une enquête parallèle. Elle appelle à la rescousse son ancien patron, le commissaire Claude Rouiller, et sa compagne Justine, psychiatre et profileuse. Matteo, un collègue de la police suisse qui en pince pour Aurore, vient compléter l’équipe. L’enquête débouchera sur de nombreuses arrestations sur lesquelles l’auteure ne s’attarde pas. Mais le Mage, lui, n’a toujours pas été appréhendé. Voilà qui nous promet une suite à cette aventure haletante, suite d’ores et déjà annoncée sous le  titre Ravines de sang. Olivia Gerig construit ses histoires avec habileté et ménage le suspens avec…

Top 5 des coups de cœur 2017
ACTUALITE / 16 janvier 2018

Au cours de l’année 2017, j’ai lu 80 romans, 21 essais, 12 recueils de poèmes, 4 recueils de chroniques, 4 biographies, 4 recueils de nouvelles, 4 récits, 2 albums jeunesse, 2 pièces de théâtre, 1 livre d’entretiens, 1 bande dessinée et un livre de photos, soit 136 ouvrages pour un total de 27’709 pages. Tous ne sont pas chroniqués sur ce blog. Mais j’ai eu envie de me livrer au difficile et subjectif exercice des coups de cœur de l’année écoulée. Il a donc fallu choisir, donc renoncer et par conséquent souffrir. Mais à l’arrivée, voici le classement de mes cinq coups de cœur de 2017. Le livre qui m’a le plus secoué en 2017 est celui de Gaëlle Nohant avec sa biographie romancée de Robert Desnos. Il y a les livres qui vous plaisent, ceux après la lecture desquels vous n’êtes plus tout à fait pareil et ceux qui vous ébranlent, profondément, durablement. Légende d’un dormeur éveillé est de ceux-là! Quel torrent d’amour pour Robert Desnos a-t-il fallu à Gaëlle Nohant pour tisser ce subtil roman biographique, le surpiquer de citations qui font toujours sens et éclairent le récit? Desnos n’a jamais adhéré à aucune chapelle, ni celle du…

Le cri du diable, par Damien Murith, éditions L’âge d’homme
CRITIQUE , ROMAN / 15 août 2017

[RENTREE AUTOMNE 2017] Damien Murith a fait une entrée en littérature très remarquée en 2013 avec La lune assassinée, premier roman d’une trilogie qui s’achève avec Le cri du diable. On retrouve toute la force de l’auteur, cette écriture près de l’os, qui nous avait tant séduit dans le premier roman et qui s’était un peu diluée avec Les mille veuves. Ici, pas un mot de trop pour dire le village, l’homme malade et peut-être contagieux qui finit par mourir. Camille, sa veuve, est convoitée. Et lorsqu’elle demande de l’aide pour mettre au monde le veau, celui qui vient aider la vache à mettre bas met aussi ses mains sous la jupe de Camille et la langue dans sa bouche. Pour se défendre, Camille s’aide de la fourche, et tue. Pour échapper à la vengeance, elle prend le train pour la ville, où une autre vie l’attend. Une autre vie où les hommes ne changent pas, fussent-ils peintres. Damien Murith travaille sa phrase jusqu’à l’épure. Le texte évoque plus qu’il ne décrit. Il n’en est que plus fort, plantant les crocs de la littérature dans le cœur du lecteur. Des personnages en ombres plus qu’en lumière, des destins contrariés, des…

Amarres, par Marina Skalova, éditions L’âge d’homme
CRITIQUE , RECIT / 3 juillet 2017

Avant ce récit, Marina Skalova n’a publié qu’un recueil de poésie. Et ce nouveau texte en est tout imprégné. Ce qui frappe d’emblée, c’est le rythme et le souffle de chaque phrase. Un rythme qui se déstructure en fin de récit pour imposer plus violemment encore au lecteur les ultimes émotions. Ce récit est un conte. Il nous raconte l’histoire de ce navigateur qui débarque sur une île qui n’est jamais nommée, mais qui pourrait être la Suisse. Une île dont il  a étudié les coutumes et appris la langue. La méfiance est popurtant au rendez-vous et l’intégration difficile, quasi impossible. Un artisan pourtant lui cède son atelier-logis, désireux de prendre la mer et de partir découvrir le monde. Malgré tout, le narrateur ne trouve pas sa place dans la communauté, se marginalise, achète ses provisions presque clandestinement. Pourtant un jour, un habitant qui a voyagé, vu d’autres contrées, l’invite à partager un repas. Le narrateur le quittera pourtant avec un sentiment étrange, un malaise. La pluie tombe abondamment et la tempête fait rage. Puis certains autochtones tombent malade et meurent. Le narrateur de ce très beau récit est confronté au refus de l’altérité, à la méfiance, au rejet et…

Les Lueurs, par Matthieu Mégevand, Editions L’âge d’homme
AUTOBIOGRAPHIE , CRITIQUE , RECIT / 20 mars 2016

Dix ans après les événements, Matthieu Mégevand revient dans ce récit sur la maladie qui l’a frappé alors qu’il n’avait que vint-et-un ans. La maladie? Un lymphome de Hodgkin, soit un cancer du système lymphatique. Le récit commence par les vacances de jeunes adultes dans le sud de la France. Premières manifestations de la maladie qui n’est pas encore perçue comme telle. Retour à Genève. Premiers examens, diagnostic. «Ce que me dit ce radiologue et qui ne laisse plus aucun doute: « Un écartement au niveau du cœur ». Cette phrase-là, elle résonne dans ma tête. Elle change toute ma vie.» Pour l’auteur, il s’agit d’explorer ce que la mémoire a retenu de ces événements qui ont changé toute sa vie. Qu’a retenu la mémoire, qu’a-t-elle oublié? Dès les premières pages, cet aveu : «Je dois le dire. Ce premier souvenir que je raconte: le mettre ainsi par écrit, le mettre en mot déjà me coûte. Cela m’inquiète, cela dénature tout.» L’auteur s’acharne pourtant, fouille dans les souvenirs et dans un carnet noir où sont consignés les poèmes, les pensées, le journal de l’époque. Mais Matthieu Mégevand va plus loin et fait de ce récit un véritable objet littéraire. A chaque étape…