Ma part de Gaulois, par Magyd Cherfi, Editions Actes Sud

13 avril 2017

S’il paraît treize ans après Livret de famille, ce récit de Magyd Cherfi est chronologiquement antérieur. Il raconte l’année du bac de l’auteur. Il sera la premier à l’obtenir dans sa cité et l’épisode de la remontée de la rue Raphaël, le jour des résultats, est digne des meilleurs westerns.

Pour obtenir ce bac, le jeune Magyd a dû faire face à de multiples pressions, souvent violentes. Celle de sa mère d’abord, qui n’a plus que le mot bac à la bouche. Les vannes de la bande ensuite. Avec ses potes, Samir le militant et Momo le beau parleur, Magyd est régulièrement traité de pédé parce qu’il lit, et se fait même casser la gueule, pour la même raison. Il y a la pression du désir adolescent, impossible à satisfaire dans une cité ou un poème adressé à une fille est sanctionné par une sévère correction, administrée sur le siège arrière d’une voiture par les frères et les cousins de la belle. Il y a aussi la pression des plus jeunes et des familles pour celui qui joue les grands frères, entre soutien scolaire aux petits et ambassade auprès des mères pour que leur filles puissent assister à l’atelier théâtre. Pression enfin de la France et des Français, qu’on ne peut accueillir dans la cité sans qu’ils se fassent démolir le portrait, et dont les appartement, quand ils vous y invitent, vous montrent le fossé abyssal qui vous sépare d’eux. Alors, même si Magyd est le premier «arabe» de sa cité à obtenir le bac, son avenir ne s’annonce pas forcément rose. Et dans son cas, c’est la musique qui va faire la différence.

Depuis Livret de famille, l’écriture de Magyd Cherfi s’est densifiée et fluidifiée. Il parle à son lecteur comme à un ami, un confident. Là ou l’auteur tentait d’attirer l’attention il y a treize ans, il dresse aujourd’hui un constat largement plus désabusé, comme si l’espoir s’était singulièrement amenuisé. Un livre fort sur l’un des problèmes majeur de la France.

Ma part de Gaulois, par Magyd Cherfi, Editions Actes Sud, 259 pages

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