De rien, c’est-à-dire de tout, par Bertrand Baumann, éditions de L’Aire
CHRONIQUES , CRITIQUE / 20 janvier 2018

Enseignant à la retraite, Bertrand Baumann nous livre un deuxième volume de ses notules, instants éphémères, réflexions humanistes, impressions d’un monde qu’il aborde dans une perpétuelle double posture : à la fois dedans, et souvent dehors. Traversant les années 2010 à 2014, De rien, c’est-à-dire de tout n’est pas un journal intime. Bertrand Baumann n’est pas un diariste, il l’avoue volontiers à l’occasion : des jours, parfois des semaines sans écrire. Quant à l’intime, s’il affleure parfois, il ne prend jamais la première place. L’amitié amoureuse pour Mathilda en est le meilleur exemple. L’auteur évoque plutôt qu’il ne décrit. «Mes notules sont la petite monnaie du temps, la petite monnaie de ma vie. Depuis quelques années, je vide ma crousille. Mais ma vie actuelle y dépose quelques pépites.» Ce pépites, ce sont des rencontres avec des personnes réelles, à l’instar de Niki qui veut absolument passer son permis de conduire pour s’en sortir dans cette Suisse qui la rejette, ou imaginaires, comme ce poivrot suicidaire sauvé par l’auteur. Bertrand Baumann est aussi un lecteur et un traducteur. Il nous livre de fines réflexions sur ses traductions de Robert Walser ou des Aphorismes de Lichtenberg, s’interroge sur le pouvoir des mots, sur leurs…

Cœurs silencieux, par Anne Brécart, éditions Zoé
CRITIQUE , ROMAN / 28 décembre 2017

Dans ses Mémoires d’outre-tombe, Chateaubriand écrit ceci: «Montaigne dit que les hommes  vont béant aux choses futures: j’ai la manie de béer aux choses passées. Tout est plaisir, surtout lorsque l’on tourne les yeux sur les premières années de ceux que l’on chérit; on allonge une vie aimée; on étend l’affection que l’on ressent sur des jours que l’on a ignorés et que l’on ressuscite; on embellit ce qui fut de ce qui est; on recompose de la jeunesse.» Avec Cœurs silencieux, Anne Brécart recompose indiscutablement de la jeunesse. Est-il possible de remonter aux sources de l’amour et du désir? Arrivée au milieu de la cinquantaine, Hannah quitte celui qui a partagé vingt-cinq années de sa vie. D’abord réfugiée chez une amie du même âge et de même situation, elle saisit le prétexte du règlement de la succession de sa mère pour retourner à Chandossel, son village d’enfance. Dans la maison familiale, Hannah est rattrapée par le passé, par les odeurs, par les ciels et par la nature. Rien n’a changé ou presque dans le village fribourgeois. Au premier réveil dans cette demeure du souvenir, il est là, devant la porte, pour l’aider à porter les bûches qui alimenteront le…

De l’enfance éperdue, par Pierre Voélin, éditions Fata Morgana
CRITIQUE , POESIE , ROMAN / 4 juin 2017

Belle plongée dans une enfance rurale et proche de la nature. Dans une langue magnifique, Pierre Voélin livre un portrait impressionniste et saisissant. Le lecteur s’imprègne de senteurs, de couleurs, d’humidité et de vent. A la limite entre enfance éperdue et enfance perdue – la vie à la campagne exige de grandir vite – ce beau livre flirte avec les époques. Est-il d’aujourd’hui, d’hier ou d’avant-hier? Peu importe, tout prend ici une dimension universelle et s’adresse à la part d’enfance qui subsiste en chacun de nous. De l’enfance éperdue, par Pierre Voélin, éditions Fata Morgana, 2017, 88 pages