La terre tremblante, par Marie-Jeanne Urech, Hélice Hélas éditeur

7 août 2018

La terre tremblante est un conte, une fable. Bartholomé de Ménibus quitte son petit village après l’enterrement de son père. Il veut savoir ce qu’il y a derrière la montagne. Il commence l’escalade encore vêtu de son costume de dimanchedeuil. Bartholomé découvre que derrière la montagne, il y a une autre montagne, puis une autre encore. Il parviendra pourtant à la mer. Derrière chaque verticalité, un monde nouveau: celui des vaches-hublot, celui des cimetières de déchets nucléaires, celui des champs de cheveux, celui de l’élevage de porcs à la verticale, d’autres encore. Au cours de son périple, Bartholomé exercera toutes sortes de métiers dont celui de nettoyeurs de déchets de satellites dans l’espace.

Au village, on l’appelle l’ange boiteux en raison de sa claudication. Bartholomé n’a jamais répondu à son amour. Mais elle part pourtant sur ses traces, avec sa luge et ses livres. Dans une double narration savamment construite, Marie-Jeanne Urech nous raconte une histoire d’amour tout en pointant du doigt les travers d’un monde globalisé. Derrière chaque montagne, une société tente de survivre. L’occasion pour l’auteure de porter un regard critique et écologique sur la modeste condition humaine.

Le voyage de Bartholomé s’achève sur un continent de déchets, en pleine mer, continent sur lequel deux enfants le retiennent prisonnier. Paradoxalement, ces deux enfants ne désespèrent pas de créer un monde nouveau et vivable sur cette gigantesque île de plastique. La langue de Marie-Jeanne Urech est à la fois subtile et volontairement naïve, tout comme le son les images qu’elle offre à notre réflexion. On pense au geyser d’excréments provoqué par le déclenchement simultané de toutes les chasses-d’eau de la ville àune heure précise, qui rappelle le jaillissement du pétrole.

Le voyage de Bartholomé est un cheminement dans l’espace, mais aussi dans le temps. Un temps perpétuellement décalé en raison de la double narration, celle des bouteilles à la mer de Bartholomé, et celle du récit de l’ange boiteux qui lui répond en lui faisant part de sa quête. Une réussite!

La terre tremblante, par Marie-Jeanne Urech, Hélice Hélas éditeur, 2018, 118 pages

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