A l’origine, La Musica est une dramatique commandée par la BBC avant de devenir une pièce de théâtre créée le 8 octobre 1965 au Studio des Champs-Elysées, à Paris, puis d’être enfin adaptée au cinéma en 1967 par Marguerite Duras elle-même et Paul Seban. L’appareil critique proposé par La Bibliothèque de la Pléiade (Œuvres complètes, volume 2) donne à découvrir le synopsis de la dramatique commandée par la BBC, des extraits de son script, un texte de présentation de l’édition originale de la pièce (Gallimard, 1965), un synopsis du film ainsi que des notes pour ses deux interprètes, Delphine Seyrig et Robert Hossein. La trame de l’histoire ne varie que peu d’une version à l’autre. Seules les notes pour les deux acteurs donnent une idée plus précise du caractère des personnages. Nous sommes à Evreux, dans le hall d’un hôtel. Un homme et une femme qui viennent de divorcer s’y retrouvent et se racontent leur histoire. Il y est évidemment question de La Musica des mots et des sentiments, Musica à laquelle il faut éviter de succomber. Le hasard a voulu que je lise cette courte pièce de Marguerite Duras juste après Nos débuts dans la vie, de Patrick Modiano….
Patrick Modiano n’avait rien publié depuis son Prix Nobel de Littérature, en 2014. Et voilà qu’il nous offre simultanément un roman et une pièce de théâtre, intimement liés. Nos débuts dans la vie, la pièce de théâtre, a été écrite avant le roman, de l’aveu même de l’auteur, comme s’il fallait en passer par cette pièce pour retrouver le rythme romanesque. A tel point que Patrick Modiano déclare à l’hebdomadaire Les Inrockuptibles que la pièce aurait pu être un chapitre de son roman, Souvenirs dormants. Nos débuts dans la vie se déroule dans un théâtre. Mise en abîme à tiroirs. La pièce joue avec La Mouette, celle de Tchekhov que répète Dominique, vingt ans, alors que son amoureux, Jean, vingt ans lui aussi, se promène avec le manuscrit de son premier roman qu’il garde dans une mallette attachée à son poignet par des menottes. Il craint que le compagnon de sa mère ne lui dérobe ses écrits pour les détruire. Elvire, la mère de Jean, est comédienne (comme celle de Modiano), elle aussi. Elle jalouse Dominique qui, malgré son jeune âge, se voir proposer de jouer Tchekhov, alors qu’elle reste cantonnée à des rôles de boulevard. Comme c’est presque toujours…