«Avant le 7 janvier 2015, je ne me souvenais plus que j’étais une enfant.» 7 janvier 2015, la date est encore dans toutes les mémoires. C’est ce jour-là que la rédaction de Charlie Hebdo a été massacrée dans un attentat épouvantable. Presque deux ans après les événements, Gabrielle Maris Victorin rend hommage à son père, l’économiste, écrivain et romancier Bernard Maris, qui a perdu la vie ce jour-là. Elle raconte avec pudeur les moments cruels, insoutenables, ceux de la découverte du drame et ceux de l’après drame: images en boucle sur les télévisions, reconnaissance du corps, liquidation de l’appartement paternel, récupération de ses effets personnels au poste de police. Mais l’essentiel de ce récit n’est pas là. Gabrielle Maris Victorin livre un portrait tendre de son père qu’elle nous décrit en amoureux de la littérature, de Kafka en particulier, en père drôle et attentionné, capable de chanter Eddy Mitchell et Fats Domino à tue-tête avec sa fille dans la voiture (voir la bande son du récit). Ce père qui aurait aimé être journaliste et qui prenait un plaisir fou à participer aux séances de rédaction de Charlie Hebdo. Gabrielle Maris Victorin dépasse ses peurs de fillette, d’adolescente et de jeune…
«On dit des choses solides, lorsqu’on ne cherche pas à en dire d’extraordinaires.» La phrase d’Isidore Ducasse s’applique parfaitement à ce bel album de Catherine Meurisse, dessinatrice qui a échappé au massacre de Charlie Hebdo grâce à une panne de réveil. Comment se remet-on d’un tel traumatisme? Comment accepter, comprendre, intégrer la disparition de tous ces collègues, de tous ces amis? Catherine Meurisse raconte brièvement son entrée à Charlie Hebdo, dix ans avant l’horreur, sa soirée du 6 janvier et son arrivée tardive du 7. Elle narre beaucoup plus longuement, et c’est tout l’intérêt de l’album, ce qui s’est passé après: la dévastation, la dissociation, la perte des souvenirs, la protection rapprochée, la solitude et l’impossibilité d’être seule. Comment s’en sortir, comment continuer à vivre? Le syndrome de Stendhal semble être la seule planche de salut. Ce syndrome est une maladie psychosomatique qui provoque des accélérations du rythme cardiaque, des vertiges, des suffocations, voire des hallucinations chez certains individus exposés à une surcharge d’œuvres d’art, et donc à une surcharge de beauté. Dans son album autobiographique, Catherine Meurisse raconte sa résidence à la Villa Médicis où elle espère se confronter à cette surcharge de beauté. Mais dans un premier temps,…